
Dans un contexte diplomatique tendu entre Paris et Alger, un fonctionnaire occupant un poste dans une sous-direction du ministère de l'Économie est soupçonné d'avoir livré des informations confidentielles sur des ressortissants et opposants algériens en France à un service de renseignement extérieur algérien, a appris ce mercredi 12 mars l’Agence France-Presse (AFP).
Le fonctionnaire a été placé sous contrôle judiciaire. Il est soupçonné d’avoir transmis à une personne travaillant au consulat d’Algérie de Créteil des informations concernant des Algériens vivant en France, notamment des opposants au régime d’Alger.
Dans une enquête sur la divulgation d’informations concernant des Algériens vivant en France, dont des opposants au pouvoir, le fonctionnaire a été interpellé le 16 décembre 2024 par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI). Il a été mis en examen le 19 décembre pour des infractions liées à l'espionnage, dont "intelligence avec une puissance étrangère" et "collecte frauduleuse de données portant atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation", précise la même source.
L’homme de 56 ans, a la double nationalité franco-algérienne et a officié en tant que chef de secteur à la sous-direction du numérique de l'Administration centrale du ministère de l'Économie. Il avait notamment accès à des données et fichiers confidentiels. Outre les informations transmises sur l'identité et la localisation de ressortissants algériens en France, et d'opposants politiques. Le fonctionnaire a ciblé des "influenceurs", ces expatriés disposant d'une large audience sur les réseaux sociaux au sein de la diaspora algérienne.
Cet homme est soupçonné d’avoir été « en contact régulier avec une personne de nationalité algérienne travaillant au consulat d’Algérie de Créteil » et « de lui avoir transmis des informations personnelles et sur les demandes d’asile » concernant des Algériens, et notamment « des opposants notoires » au régime, a précisé le ministère public.
Sollicité par l’AFP, Sipan Ohanians, l’avocat du fonctionnaire de Bercy, a affirmé que son client était:
« victime d’une campagne de menaces et de manipulation d’une puissance étrangère ayant resserré l’étau autour de lui ».
La DGSI a également révélé l'implication présumée d'une employée de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, âgée de 46 ans, et qui aurait transmis des informations confidentielles au fonctionnaire concernant "la situation personnelle ou administrative" de ressortissants algériens demandeurs d'asile ou de titres de séjour en France.
D’après une source proche du dossier, le fonctionnaire de Bercy avait noué une « relation intime » avec une assistante sociale de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, qu’il sollicitait pour obtenir des renseignements. Cette dernière a été mise en examen le 7 février pour “violation du secret professionnel “, selon le parquet, précise de son côté le quotidien Le Monde.
L’information judiciaire avait été ouverte le 20 novembre 2024 pour
« intelligence avec une puissance étrangère, livraison à une puissance étrangère d’information sur intérêt fondamental à la nation, soustraction et divulgation de secret-défense nationale par son dépositaire, provocation à un crime de trahison ou espionnage non suivie d’effet, et violation du secret professionnel ».
D’après une source proche de l’enquête, parmi les profils recherchés, dont des opposants : deux Algériens sous le coup d’un mandat d’arrêt international pour terrorisme, un journaliste réfugié, un Algérien ayant porté plainte en France contre un général… Ces personnes ont, pour « certaines », été « victimes de violences, menaces de mort ou tentative d’enlèvement », a souligné cette source, sans donner davantage d’éléments sur le lien éventuel de causalité. Les investigations se poursuivent.
La rédaction/ l’AFP
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