Malgré l’absence de repentance de la France, source de tensions entre elle et Alger, les deux pays ont décidé de conjuguer leurs efforts pour préserver la mémoire commune de la période allant de 1830 à 1962.
La France, sans s’être excusée, a néanmoins accepté de s’unir à Alger dans une entreprise collective visant à surmonter le délicat enjeu du dialogue mémoriel. C’est ainsi qu’en août 2022, la commission mixte algéro-française a vu le jour.
Ce n’est toutefois qu’en janvier 2023 que les dix membres, cinq de chaque côté, ont été désignés : Benjamin Stora, Florence Hudowicz, Jacques Frémeaux, Jean-Jacques Jordi et Tramor Quemeneur, ainsi que leurs homologues algériens, Mohamed El Korso, Idir Hachi, Abdelaziz Filali, Mohamed Lahcen Zighidi et Djamel Yahiaoui.
Depuis cette date, il semblait que le moteur de la commission souffrait d’un retard à l’allumage, avec une certaine léthargie constatée dans les travaux, probablement en raison de la bureaucratie ou d’une incompréhension politique. Cependant, ce mois-ci, la commission a enfin communiqué ses premiers résultats en date du 25 janvier.
Ainsi, la Commission mixte algéro-française prévoit de restaurer et mettre en valeur des cimetières d’algériens, notamment au moyen de plaques commémoratives, divers lieux liés à la mémoire.
Ces sites se situent à l’ile Sainte Marguerite, Toulon, Pau, Amboise, Sète, Agde, Porquerolles, Calvi, Corte, Ajaccio, ainsi qu’en Guyane et en Nouvelle-Calédonie.
Parmi ces lieux, le plus ancien cimetière musulman de France sur l'île Sainte Marguerite.
Ce havre de paix a servi de prison pendant longtemps où pendant 40 ans entre 1837 et 1884, plus de 3000 déportés étaient emmenés de force sur l’île. Ces déportés s’opposaient au système colonial.
Il s’agissait de “prisonniers politiques”, des otages de renom. Ainsi, le plus grand cimetière musulman de France fut érigé sur l’île, dissimulé sous la verdure des arbres. Deux cent soixante-quatorze Algériens, hommes, femmes et enfants, y trouvèrent leur dernière demeure.
Leurs tombes étaient marquées par des cercles de pierres. Certains succombèrent à des maladies telles que la dysenterie ou le choléra.
D’autres, des nourrissons, périrent de malnutrition, car le traumatisme de la guerre avait tari le lait maternel. Un lieu empreint d’histoire et de souffrance, où résonnent les échos d’un passé douloureux.
En outre, la Commission mixte a choisi d’autres affaires à traiter. Il s’agit notamment des archives, du retour des symboles, de la bibliographie, de l’établissement d’un site web et de l’enseignement.
Ainsi, les nobles reliques de l’Émir Abdelkader, comme son glaive, son manteau, son Livre sacré et ses canons, lui seront rendues.
Pareillement, les possessions d’Ahmed Bey et d’autres figures illustres de l’Algérie reprendront leur place dans l’histoire commune.
La Commission accueille avec joie l’offre des musées français, tels que le quai de Branly ou Le Louvre, d’établir un catalogue des objets venant d’Algérie, a déclaré la Commission mixte qui a préconisé, entre autres, l’inventaire des livres relatant l’histoire coloniale en Algérie dans toutes les langues et la désignation de ceux qui seraient à digitaliser ou à traduire.
Yacine M
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