En Algérie, la minorité chrétienne est fortement harcelée et réprimée, et devant le recul ostentatoire de la tolérance religieuse, ni la société civile, ni les élites politiques ou intellectuelles, n’osent briser le tabou autour de ce problème par peur de représailles.
Le 2 juillet 2024, le Centre européen pour le droit et la justice a organisé une conférence au Conseil des droits de l’homme de l’ONU à Genève pour plaider la cause des chrétiens d’Algérie, persécutés en raison de leur foi par le gouvernement algérien.
Lors de cette conférence coorganisée avec l’ONG Jubilee Campaign, plusieurs missions diplomatiques auprès des Nations Unies, notamment de la Belgique, des États-Unis, des Pays-Bas, de la Suède et de la Suisse, ont manifesté un intérêt particulier pour la situation des chrétiens en Algérie. L’événement a souligné les graves restrictions de la liberté de réunion et d’association qui privent les chrétiens de l’exercice libre de leur foi.
Situation des Chrétiens en Algérie
L’Algérie, avec une population de 46 millions d’habitants, compte environ 144 000 chrétiens, principalement algériens convertis au christianisme ces dernières décennies. Bien que la Constitution algérienne garantisse en principe la liberté d’expression, la loi algérienne criminalise toute tentative de conversion d’un musulman à une autre religion et a retiré la liberté de conscience de la Constitution en 2020. La législation sur les associations et les cultes non musulmans est appliquée de manière arbitraire, ce qui a conduit à la fermeture de nombreuses églises évangéliques.
Actuellement, 43 des 47 églises de l’Église protestante d’Algérie (EPA) sont fermées, et au moins 18 chrétiens font face à des peines de prison. Parmi eux, le Pasteur Youssef Ourahmane, vice-président de l’EPA, a été condamné à un an de prison ferme pour avoir célébré un culte non autorisé. L’Église catholique, dont les fidèles sont majoritairement étrangers et subsahariens, doit également faire face à des restrictions sévères, notamment l’interdiction de la charité depuis la fermeture de Caritas Algérie en octobre 2022.
Classement et Appels Internationaux
L’Algérie est classée 15e dans l’Index Mondial de Persécution des Chrétiens 2024 et figure sur la liste de surveillance de la Commission américaine sur la liberté religieuse internationale (USCIRF) depuis 2021. Les experts de l’ONU ont appelé l’Algérie à respecter les libertés d’association et de religion. La Rapporteuse spéciale sur la liberté d’association, Gina Romero, et la Rapporteuse spéciale sur la liberté de religion, Nazila Ghanea, ont insisté sur la nécessité de garantir ces droits et de mettre fin aux jugements arbitraires contre les chrétiens et d’autres minorités religieuses.
Le Pasteur Youssef Ourahmane et sa fille Sarah ont souligné que les conversions au christianisme, notamment en Kabylie, sont mal vues par le gouvernement algérien, qui les associe aux mouvements indépendantistes de la région. En 2006, l’ordonnance n° 06-03 a été adoptée pour encadrer les cultes non musulmans, permettant ainsi une discrimination systématique envers les chrétiens.
Critiques et Appels à l’Action
Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France en Algérie, a critiqué le faux semblant de tolérance religieuse en Algérie. Malgré des invitations officielles à des évêques catholiques et la rénovation d’églises, les chrétiens restent soumis à des restrictions sévères et bureaucratiques, et le prosélytisme est strictement interdit. L’ECLJ, aux côtés de l’Église protestante d’Algérie et des experts de l’ONU, appelle l’Algérie à restaurer la liberté de conscience et à abroger toutes les dispositions discriminatoires contre la liberté de pensée, de conscience et de religion.
La rédaction/L'ONU
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